Le simple fait de
penser à la fin de journée me laisse rêveur. Assis sur ma chaise,
dans cette salle trop pleine, devant cet enseignant soporifique, je
ferme les yeux et j'attends de pouvoir sortir de cet établissement,
de ce lycée impropre à l'éducation. Dehors, je retrouve mes amis.
On rit, on sourit, on traîne un peu dans les rues avant de se poser
dans un parc. On discute, on boit, on fume, sans que personne ne nous
importune.
☼
La pause café est
tout juste terminée que, déjà, il faut se remettre au travail. Un
tout petit box pour des piles de dossiers. Heureusement, le week-end
ne tarde pas, interrompt le métro-boulot-dodo et me permet de me
reposer. Je coupe mon téléphone, je dors jusqu'à onze heures et je
passe le reste de mes journées à regarder des films et à me
promener.
Peu m'importe que le
travail reprenne bientôt. Tant pis si je n'ai pas le temps de
réaliser mes rêves. J'ai un bon salaire, je suis bien intégré à
la société et, deux jours par semaine, je suis libre.
☼
La société
occidentale ? C'est de la merde. Une supercherie moderne et
politiquement correcte qui étend ses racines – comme autant de
maladies – à travers le monde et qui, sous couvert de république
et de liberté, instaure une forme légale d'esclavagisme. On nous
formate à l'école et l'on nous apprend à travailler toute notre
vie, à sacrifier notre santé pour gagner de l'argent que l'on
pourra ensuite dépenser pour se soigner et pour « profiter »
de la vie, ou de ce qu'il en reste.
Je refuse d'être
esclave ou de me battre pour cette société contaminée et malade.
Je préfère prendre mon sac à dos et arpenter le monde, voir ce qui
peut être vu, apprendre à vivre différemment et découvrir de
nouvelles cultures. Tant pis si l'on me considère comme un paria ou
un hippie. C'est mon choix. C'est ma vie. Je suis libre.
☼
Vivre différemment.
Voilà une bien belle idée, séduisante et attrayante. Comme la
majorité des gens autour de moi, je suis conscient des problèmes
actuels ; les guerres, la famine, la maladie et la destruction
progressive de la planète et, comme la majorité des gens autour
de moi, je veux changer mais je ne le fais pas. Chacun vous le dira,
à raison ; on ne peut rien y faire. Nous sommes trop petits et
insignifiants pour faire bouger les choses. Bien sûr, je me mens à
moi même et, au fond de moi, je le sais.
Je pourrais,
peut-être, aider au changement mais cela me demanderait bien trop
d'efforts et, surtout, je risque de ne plus être « normal »,
je ne veux pas passer pour un hippie extrémiste. Après tout, même
si ma vie n'est pas parfaite, elle n'est pas si mal ; j'ai
l'électricité, l'eau courante et, moi, je ne meurs pas de faim.
D'autres se battront et trouveront les solutions. Moi, je préfère
baisser la tête, fermer les yeux et m'enfermer dans mes
mensonges. C'est mon choix. C'est mon illusion : je suis libre.
☼
Insignifiant. Je
suis insignifiant. Un simple numéro, parmi tant d'autres. Tous, nous
ne sommes, que ça ; des numéros. Nous sommes du bétail, à
l'image de celui que l'on mange et que l'on exploite. Une masse
d'individu destinés à servir quelques élites, prêts à courber
l'échine, à sacrifier santé rêves et envies pour leurs profits.
On nous garde dans l'ignorance, on nous impose un idéal, toujours
axé sur le matériel pour nous pousser, sans cesse, à la
surconsommation.
Nous ne sommes que
des numéros et si, par le plus grand des hasard, on essaie d'être
plus que ça, d'être un individu à part entière, on nous brise.
J'ai essayé. J'ai
voulu être moi même. Toute ma vie durant, on m'a dit ce que je
devais faire, penser et croire mais je n'étais pas d'accord. Je me
suis accroché à mes convictions. J'ai lutté pour être autre chose
qu'une suite de chiffres dans un dossier mais on m'en a empêché.
J'ai eu beau chercher de l'aide et essayer de convaincre les gens
autour de moi de bouger, une seule réponse revenait sans cesse « On
ne peut rien y faire. Nous sommes trop petits et insignifiants pour
faire bouger les choses. » Je suis seul, désespéré et
désemparé. Je ne vois plus qu'une solution pour échapper à cette
tyrannie. Je ferme les yeux. Je m'envole. Je suis libre.
☼
La liberté est une
idée bien complexe, difficile à cerner, à imaginer et à
concevoir. Sans doute dépend-elle de nous, de notre vision, de notre
pensée. C'est un idéal, une utopie que peu de gens parviennent à
trouver. C'est réservé à d'autres, à une « élite »
dont on ne fait pas partie. Alors, à défaut de pouvoir, vraiment,
être libre on fait comme on peut, avec ce que l'on a. On cherche des
excuses, on accepte mensonges et illusions en se disant que,
peut-être « ça ira mieux demain. » Et puis, avec un peu
de chance, nos enfants auront plus de chance que nous.
Lorsque je parle de
la société, j'aime à employer une analogie qui m'est venue il y a
quelques années déjà : on a tous déjà eu, ou vu, ces jouets
pour enfants qui se composent d'une boîte avec des trous de
différentes formes – carré, étoile, rond, triangle… – et des
pièces en bois qui correspondent à ces formes, le but étant de
mettre les bonnes pièces dans les bons trous. Pour moi, si le monde
devait être un jouet de ce genre alors la société serait un carré
et les gens les pièces en bois. Le problème, c'est que, peu importe
votre forme, on vous force à entrer dans le carré et si vous n'êtes
pas adaptés, on coupe ce qui dépasse jusqu'à ce que vous puissiez
entrer dans ce carré pour vous fondre dans le moule et faire partie
de la masse.
On nous parle de
liberté mais on la viole dès notre naissance lorsque l'on nous
force à entrer dans des cases pré-fabriquées. Cette liberté, on
peut en jouir autant que l'on veut, du moment que l'on ne sort pas
des normes crées et imposées par d'autres. Le but de tout ça étant
de nous garder dans la masse informe et désinformée des
consommateurs qui courbent le dos et se laissent abuser par quelques
élites qui nous manipulent à coup de politiquement correct et de
bonheur artificiel. Tout dans cette société est mensonger. Tout est
dicté et/ou fortement influencé par des industries, des lobbys et
des bien-pensants qui parlent au nom du profit, de la rentabilité et
de l'argent. Des dizaines, sûrement des centaines, de maladies sont
dîtes incurable parce qu'une personne malade, qui achète des
médicaments à vie, est plus intéressante et rentable qu'une
personne guérie. On nous impose un bonheur matériel qui nécessite
de l'argent – et, donc, de travailler – parce que si les gens
réalisaient que l'on n'a pas besoin de toutes ces conneries de
consommation pour être heureux, les industries s'effondreraient.
Moi, qui ai écris
ces lignes et ces cinq courtes histoires, j'ai déjà fais mon choix.
J'ai décidé de vivre en suivant mes principes, mes idéaux et mes
idées. J'ai choisis de ne pas me laisser dicter mon comportement par
les bien-pensant avec leur merde prémâchée et prédigérée,
celle-là même que l'on nous force à avaler encore et encore depuis
l'enfance. Ce n'est pas un chemin aisé, il est semé d'embûche et
on a bien plus de détracteurs que d'alliés mais, vous savez quoi ?
Ça en vaut la peine.
Je suis clairement
en marge de la société mais cela ne m'empêche pas de vivre.
Je
respire. Je suis heureux. Je suis libre.
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